(Critique) Angry Birds 2 de Thurop Van Orman

Une fois encore, l’appât du gain mène la danse au sein d’un studio d’animation. Alors qu’Angry Birds premier du nom était une jolie surprise qui réinvestissait les rouages du jeu mobile dont il était l’adaptation malicieuse, son petit frère est particulièrement dispensable. Pire encore, il enfonce le clou d’une saga purement commerciale (le premier ne cachait pas ses objectifs mais se révélait finalement efficace). Récit paresseux à l’humour vaguement drôle, Angry Birds 2 est oublié aussitôt vu, preuve ultime de son impuissance cinématographique.

Synopsis : Les oiseaux et les cochons continuent de se battre sans relâche. Mais la menace d’un nouvel adversaire vient perturber les voisins ennemis. Red, Chuck, Bombe et l’Aigle Vaillant recrutent Silver, la sœur de Chuck et s’associent aux cochons Léonard, son assistante Courtney et Garry (le geek), pour former une équipe improbable et tenter de sauver leurs foyers !

Des l’introduction, on comprend que le récit originel – la difficile intégration d’un être peu souriant dans une société colorée – n’a plus lieu d’être et que le titre n’a plus grand chose à voir avec l’intrigue. Puisque Red n’est plus en colère, les scénaristes invitent un nouvel oiseau mécontent pour justifier une nouvelle intrigue. Zeta, doublée par Karin Viard en VF, est le premier défaut d’une longue liste. Objectifs ridicules, personnalité faussement machiavélique et sbires parodiques : une caractérisation bien maigre pour des enjeux scénaristiques anémiques. Le premier film possédait un antagoniste volontairement ridicule avec ses cochons verts – entre-temps ralliés aux oiseaux colorés – mais savait surprendre avec de subtils clins d’œil au jeu mobile. On se souvient encore de l’extraordinaire bataille finale qui singeait intelligemment les lancers d’oiseaux du matériau d’origine.

Pourtant, l’équipe créative est clairvoyante et ne prend jamais au sérieux son sujet à grands coups de musiques improbables. Pas une séquence n’évite le surgissement malvenu d’une musique inappropriée (à croire que le réalisateur ne peut envisager de générer du rythme sans passer par la musique) de même que les scènettes comiques s’enchaînent. Sorte d’intention délibérée, la comédie est seule maître à bord de ce navire en plein naufrage. En 2019, nous en sommes encore réduits aux gags éternellement répétitifs : on ne compte plus le nombre de personnages qui s’écrasent contre un mur, une porte ou un rocher. A l’image du film, les personnages foncent tête baissée sans prendre garde aux dangers et le spectateur frôle l’overdose de gags éculés.

A côté de ces cruels manques d’inspiration, quelques réussites (relatives) surnagent. On pense notamment au trio d’oisillons qui vit sa propre aventure au fil du long-métrage même si les scénaristes n’ont rien inventé (du voyage spatial aux délires ensablés sous un cocotier, tout cela n’est pas sans rappeler les aventures sans limites de Scrat dans la saga L’Age de glace des studios Blue Sky) : ces trois petits êtres sont d’ailleurs à l’origine de la séquence la plus drôle en fin de métrage. Il faut également saluer la qualité de l’animation 3D malgré des scènes souvent surexposées. Les trois îles d’Angry Birds sont pleines de couleurs mais l’inventivité des décors et des personnages n’étonne plus vraiment. Sur le papier, les personnages qui sont encore plus nombreux qu’avant demeurent attachants – et leur mission commune ne manque pas de rebondissements – mais ils n’ont pas l’espace suffisant pour exister au-delà des stéréotypes du genre (d’ailleurs assumés dès leur présentation tonitruante à base de groupes nominaux éclairants – l’expert en explosifs, le cerveau, etc.)

En somme, ce deuxième cru des oiseaux plus vraiment en colère ne restera pas dans les annales des suites animées, loin de là. Auréolé d’un humour assez bas de plafond, d’une intrigue sans originalité et d’une réalisation plutôt paresseuse, le nouveau film des studios Sony Pictures Animation est une vraie déception. Les plus jeunes apprécieront sûrement l’hystérie chronique du film mais tous les autres regarderont gentiment leur montre en attendant que ce récit prévisible se termine.

Article rédigé par Nathan

Nourri aux univers animés depuis la découverte de "Kirikou et la sorcière" en 1998, Nathan porte son regard critique et analytique sur l'univers des longs-métrages. Il est rédacteur sur Focus on Animation depuis 2012 et est l'auteur d'un ouvrage somme sur la carrière de Michel Ocelot (chez Third Editions).

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