(Critique) Ride your wave, de Masaaki Yuasa

Quelques années après Lou et l’île aux sirènes, Masaaki Yuasa renoue avec sa fascination pour les motifs aquatiques en contant la romance teintée de merveille d’une surfeuse et d’un jeune pompier. Long-métrage dans la plus pure tradition des animés japonais qui pointent leurs nez sur nos écrans grâce aux distributeurs passionnés tels qu’Alba Films (qui distribue le film en France après maints reports dûs à la situation que l’on connaît) ou Eurozoom, Ride your wave est une histoire pleine de sentiments aux charmes enivrants contrastée par des flashbacks harassants.

Résumé : Hinako, une jeune fille passionnée de surf, déménage dans une ville balnéaire. Lors d’un incendie, elle est sauvée par un pompier nommé Minato. De cet incident va naître une incroyable fusion entre deux êtres que tout oppose. Mais Minato, jeune débutant surfeur, se retrouve un jour englouti par la mer . Alors que tout le monde tente de surmonter sa peine, Hinako s’accroche à l’esprit de son ami, qui rejaillit dans sa vie sous forme d’eau… Commence alors un nouveau chapitre de leur romance.

(c) 2021 Alba Films

Du haut de ses quatre-vingt quinze minutes, le nouveau film de Masaaki Yuasa sait habilement surprendre ses spectateurs dès lors que le scénario provoque la disparition d’un des personnages principaux. Sous ses airs de romance estivale, Ride your wave est un coffre aux trésors empli d’éléments merveilleux et de twists émouvants donnant l’espace nécessaire à ses quatre protagonistes principaux pour exister. Hinako et Minato s’aiment et se découvrent dans l’inévitable séquence de montages aux accents pop (le film peine parfois à faire fi des conventions du genre) mais la narration profite d’un drame conséquent pour redéfinir les contours de ses enjeux. Au lieu d’emprunter un chemin balisé, le scénario mêle réalité et fantastique pour cristalliser la relation naissante des personnages dans l’espace et le temps. On se prend alors d’affection pour ces êtres altruistes tournés vers le don de soi par des destinées tragiques.

Hinako, figure centrale du film, navigue littéralement entre deux mondes, le réel et l’au-delà, à en croire les nombreux plans en contre-plongée qui la relient à l’immensité bleutée du ciel. Ce sont les détails qui bâtissent l’intelligence du film : une fois n’est pas coutume, la nourriture a une place importante dans un film nippon mais elle sert intentionnellement le cours du récit en liant encore davantage les amoureux tragiques. A l’omelette alléchante des premières sorties se succèdent les sandwichs cellophanés peu engageants. Fable prenant à bras le corps la thématique du deuil, le nouveau film de Masaaki Yuasa a pour lui une émotion vive pour plaire à un large public.

(c) 2021 Alba Films

Sur le plan graphique, Ride your wave est une belle proposition à la frontière du réalisme et de l’onirisme. Parfois la mise en scène cherche à en faire un peu trop (à l’image d’un sauvetage au premier plan d’un feu d’artifice grandiloquent) mais l’ingéniosité de l’équipe créative sert le ravissement que représente le film. La magie de l’animation 2D fait mouche puisqu’elle parvient efficacement à glisser du réalisme à la poésie, en témoigne la séquence finale emplie de merveille. C’est aussi dans son recours à la métaphore aquatique et à tous ses possibles que le long-métrage de Masaaki Yuasa se révèle charmeur : bien qu’un peu répétitif, le procédé lie les personnages avec expressivité. Il en va différemment des flash-backs utilisés à outrance et qui ne font que confirmer, en général, ce que le spectateur avait d’ores et déjà compris et/ou vu. Pire encore, l’économie du récit nous inflige parfois la redite d’actions vues à l’écran dans la bouche des personnages secondaires. C’est probablement là le défaut principal du métrage : sa dimension répétitive, intrinséquement liée au scénario car l’élément déclencheur de la merveille scénaristique est une chanson fredonnée par l’héroïne.

Pour conclure, Ride your wave incarne ce qui se fait de mieux dans le genre romantique. Si le recours à outrance aux flashbacks effrite quelque peu l’émotion vive des thématiques portées par le scénario, le long-métrage n’en demeure pas moins une très belle proposition animée à découvrir en salles dès le 1er septembre ! Dans un récit entre feu et eau, Masaaki Yuasa nous invite à aimer/aider son prochain pour prétendre à l’épanouissement.

Nourri aux univers animés depuis la découverte de "Kirikou et la sorcière" en 1998, Nathan porte son regard critique et analytique sur l'univers des longs-métrages. Il est rédacteur sur Focus on Animation depuis 2012 et est l'auteur d'un ouvrage somme sur la carrière de Michel Ocelot (chez Third Editions).

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