(Critique) Kung-Fu Panda 4 de Mike Mitchell & Stéphanie Stine

La promotion plutôt discrète du film et les premières bande-annonces faisaient craindre un quatrième opus en demi-teinte pour une saga jusqu’alors de grande qualité mais l’on en ressort finalement rassuré. S’il est évident qu’il était difficile pour les équipes de DreamWorks Animation de faire mieux que le deuxième film (au panthéon des meilleures suites du septième art, n’ayons pas peur de le dire) d’autant plus que le troisième s’était déjà heurté à la comparaison avec son humour exagéré, Kung-Fu Panda 4 se révèle être une suite honorable et différente de la trilogie originelle, se permettant même d’initier un nouveau virage pour cet univers. Perfectible, mais ô combien divertissant !

Résumé : Le destin va de nouveau frapper à la porte de Po pour … l’inviter à enfin se reposer. Plus précisément, pour être nommé chef spirituel de la vallée de la Paix. Cela pose quelques problèmes évidents. Premièrement, Po maîtrise aussi bien le leadership spirituel que les régimes, et deuxièmement, il doit rapidement trouver et entraîner un nouveau guerrier dragon avant de pouvoir profiter des avantages de sa prestigieuse promotion. Pire encore, il est question de l’apparition récente d’une sorcière aussi mal intentionnée que puissante, Caméléone, une lézarde minuscule qui peut se métamorphoser en n’importe quelle créature, et ce sans distinction de taille. 

Copyright 2024 DreamWorks Animation L.L.C. All Rights Reserved.

Après avoir trouvé la paix intérieure face aux traumatismes de son enfance et atteint le statut de guerrier légendaire en accédant au monde des esprits, Po doit se préparer à être succédé dans sa fonction de guerrier dragon. Mais la retraite est difficile à accepter pour cet amoureux du kung-fu devant composer sans ses fidèles amis, les Cinq Cyclones, absents de cette quatrième aventure. Une absence significative qui donne à ce nouveau récit une dynamique différente et bienvenue alors que les seconds rôles originaux s’amoncèlent. Exit les Cyclones, bienvenue Zhen, une renarde voleuse qui se lie d’amitié avec notre panda préféré. L’idée de renouveler le casting de la saga est bonne, d’autant plus que l’équipe créative prévoit déjà une nouvelle trilogie, mais la dimension stéréotypée des nouveaux protagonistes amenuise parfois leur place dans cette nouvelle intrigue. Qu’il s’agisse de l’enfance dans la rue de Zhen ou de la galerie de bandits résidant dans les égouts de la ville de l’antagoniste, une impression de déjà-vu subsiste. Pire encore, à l’exception de Zhen, tous les nouveaux personnages manquent d’épaisseur et servent uniquement les séquences narratives – à l’image de l’assaut final.

Techniquement, Kung-Fu Panda 4 est dans la droite lignée des trois premiers films, les scènes d’action virevoltantes rivalisant d’idées de mise en scène et les clins d’oeil à la saga s’accumulant (on n’en finit plus d’entendre parler du vase aux âmes chuchotantes). Mais c’est aussi le problème d’un film qui semble parfois se chercher en cours de route, quitte à trahir en certains endroits l’univers établi jusque-là. En faisant revenir les plus grands ennemis du guerrier dragon, le long-métrage en oublie de questionner leurs motivations pour les transformer en simples pions dans le plan d’une nouvelle antagoniste intéressante (qu’avez-vous fait de Lord Shen ?) mais irrégulièrement caractérisée. Peut-on réellement croire que sa petite taille ait pu lui empêcher d’être acceptée en tant que maître du kung-fu lorsque Mante existe dans le même univers ? Le character design (ce costume !) et la mise en scène (ces plans !) iconisent le personnage en s’efforçant malheureusement de lui trouver des motivations hasardeuses dont nous aurions pu nous passer. Là où Kung-Fu Panda 2 parvenait à lier avec maestria les traumas du personnage principal aux ambitions impérialistes de son antagoniste, Kung-Fu Panda 4 laisse planer des zones d’ombre sur les motivations de certains. Et ce ne sont pas les retournements de situation prévisibles qui nous contrediront.

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Fort heureusement, la quête individuelle de Po suit son cours et embarque une nouvelle protagoniste des plus attachantes à ses côtés. Le duo aussi comique qu’émouvant qu’il forme avec la renarde est la force première d’un récit qui diffère autant qu’il ressemble aux précédents comme si l’équipe créative souhaitait proposer du neuf sans froisser les fans de la première heure. En éloignant les Cinq Cyclones, le scénario offre un bel espace de développement aux deux pères de Po dans un road-trip qui se joue aussi sur plusieurs émotions, entre humour et pathos. Même si le récit va à toute vitesse, il prend le temps de faire exister ses têtes d’affiche, à l’exception d’un maître Shifu, sous-exploité, comme toujours. Il y a bien l’apparition graphique des voix intérieures du maître et de son élève désormais légendaire mais elles s’enlisent dans la comédie. Une comédie pourtant savamment dosée, après un troisième film inarrêtable sur la délivrance de blagues faciles. Cette fois-ci, la balance entre la mise en scène épique et l’humour universel de la saga trouve un nouvel équilibre.

Au final, ce quatrième opus de la saga Kung-Fu Panda renoue avec la générosité et l’action débridée de ses aînés tout en proposant de nouvelles dynamiques pour l’avenir d’une galerie de personnages si attachante. Toutefois, à cause d’écueils narratifs trahissant parfois sa propre mythologie, le film semble parfois se construire sans horizon. L’avenir nous dira si ce quatrième opus sera le point de départ d’un renouveau salvateur. 

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En salles le 27 mars via Universal Pictures France

Nourri aux univers animés depuis la découverte de "Kirikou et la sorcière" en 1998, Nathan porte son regard critique et analytique sur l'univers des longs-métrages. Il est rédacteur sur Focus on Animation depuis 2012 et est l'auteur d'un ouvrage somme sur la carrière de Michel Ocelot (chez Third Editions).

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