(Critique) Les Elfkins : opération pâtisserie d’Ute von Münchow-Pohl

Que diriez-vous d’embarquer pour une ode à la solidarité et aux vertus fédératrices de la pâtisserie ? C’est le programme proposé par Les Elfkins : opération pâtisserie, un long-métrage allemand qui emportera à coup sûr l’adhésion du jeune public sans ennuyer leurs parents puisqu’une réflexion contemporaine se glisse sous le glaçage filmique. Après tant de reports à cause de la pandémie, ce film familial s’apprête enfin à sortir sur nos écrans français le 8 décembre prochain.

Résumé : Elfie est une petite Elfkins qui vit dans le monde secret des lutins. Elle rêve de rencontrer des humains et décide un jour de partir à l’aventure ! Elfie tombe sur Théo, un chef pâtissier grognon dont la pâtisserie ne fait plus recette. Sa nouvelle mission ? Sauver la petite boutique !

© AKKORD FILM PRODUKTION GMBH, TOBIS FILM GMBH AND ZDF

Très vite, le spectateur avisé se rend compte que le scénario réinvestit les conventions du film pour enfants pour s’adresser à son public avec efficacité. Elfie, héroïne du récit, est de ces personnages (et ces êtres réels) qui ne sont pas compris par leurs pairs malgré une clairvoyance affirmée (et des bêtises répétées). Ayant du mal à trouver sa place dans la société des elfes-artisans, elle s’engage dans une quête d’elle-même auprès des humains pour se découvrir un talent. Celle qui se définit comme « bonne a rien et gaffeuse » se révèle rapidement douée d’un palais affûté. Téméraire, tolérante et déterminée, l’héroïne incarne des valeurs qu’il est bon de rappeler au jeune public dont le film est la cible. Tandis qu’elle affronte l’humeur fluctuante des humains, ses comparses se terrent littéralement dans l’obscurantisme. Plein de bons sentiments, le scénario ne révolutionne pas le genre mais il pétrit son histoire de relations touchantes entre les personnages, qu’il s’agisse du pâtissier Théo et son frère ou des lutins diamétralement opposés.

En construisant son histoire autour d’oppositions marquées (Elfie et les autres, Théo l’artiste et son frère l’industriel), l’équipe créative réfléchit aux clivages sociaux de notre époque. La pâtisserie artisanale de Théo n’est-elle pas au bord de la faillite à cause du bulldozer industriel de son frère ? Le duel fraternel auquel prennent part les lutins en aidant l’artisan pâtissier est propice à d’innombrables scènes d’action jusqu’à l’inévitable confrontation finale. Le métrage n’est pas très surprenant pour un public averti mais les plus jeunes se prendront au jeu des péripéties avec grand plaisir. En revanche, toute la famille se retrouvera autour des thématiques abordées et ne pourra qu’être touchée par la quête des elfes pour redonner goût à la vie et au plaisir de créer à un artiste désabusé. Peu de temps morts dans cette aventure de 72 minutes, à l’exception d’une chanson un peu mièvre (« Le style Elfkins ») entonnée par l’héroïne du film.

© AKKORD FILM PRODUKTION GMBH, TOBIS FILM GMBH AND ZDF

Graphiquement, difficile d’élever Les Elfkins au rang des grandes réussites européennes bien que les défauts soient modestes. L’animation est perfectible (à l’image des personnages secondaires à la modalisation discutable, comme le chien du frère Bruno) et les textures approximatives (les gâteaux manquent de réalisme) mais le budget modeste du long-métrage ne lui empêche pas de proposer des décors travaillés et des figurants peuplant l’espace diégétique. Le film d’Ute von Münchow-Pohl est mignon au possible avec ses lutins et ses pâtisseries alléchantes et l’on oublie vite les défauts graphiques pour se laisser porter par le récit. C’est d’autant plus anecdotique qu’il s’adresse avant tout aux plus jeunes qui sont moins regardants que leurs aînés sur ce plan (si l’on en croit les nombreuses séries animées à l’animation très grossière proposées le matin sur les chaines TV).

A vos marques, prêts… Pâtissez ! Même si Les Elfkins accuse un train de retard graphique par rapport aux grosses machines mondiales, il n’en demeure pas moins riche en bonnes intentions. Propice à une séance familiale, c’est un film qui donne l’appétit de créer en famille !

Direction les salles obscures dès le 8 décembre grâce au distributeur KMBO !

Nourri aux univers animés depuis la découverte de "Kirikou et la sorcière" en 1998, Nathan porte son regard critique et analytique sur l'univers des longs-métrages. Il est rédacteur sur Focus on Animation depuis 2012 et est l'auteur d'un ouvrage somme sur la carrière de Michel Ocelot (chez Third Editions).

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